Savigny-sur-Orge. Une nouvelle décision de Laurence Spicher-Bernier, maire de Savigny-sur-Orge, annulée par le Tribunal administratif

LE DROIT D’EXPRESSION DES CONSEILLERS MUNICIPAUX MINORITAIRES CONFIRMÉ

Le tribunal administratif de Versailles, dans un jugement rendu le 10 octobre 2013, a condamné une nouvelle fois Laurence Spicher-Bernier, maire (ex UMP, Parti radical, CNI, UDI…) de Savigny-sur-Orge (37 000 habitants) pour avoir refusé un espace d’expression aux conseillers municipaux de l’opposition (PS).

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Nouvelle condamnation de Laurence Spicher-Bernier,
maire (UDI) de Savigny-sur-Orge,
par le Tribunal administratif de Versailles (15 octobre 2013)

Question. Comment débute cette affaire ?
Bernard MÉRIGOT.
La maire publie en octobre 2010 un journal « Savigny-sur-Orge. Lettre du maire ». Ce document est intitulé « Il faut remettre les compteurs à zéro et prendre les bonnes décisions pour l’avenir de Savigny ». Il s’agit d’un journal en couleur, format A4 de quatre pages. Il est distribué dans les boîtes à lettres des habitants de la commune. Soulignons que sa conception, sa rédaction, sa mise en page, les photographies, l’impression (20 000 exemplaires) sont entièrement payées par la commune. (1)

DES DÉRIVES FINANCIÈRES

Question. Quel est le contenu de cette «Lettre du maire» ?
Bernard MÉRIGOT.
On peut lire en première page, sous la signature du maire : « L’audit financier commandé auprès du cabinet reconnu et indépendant Michel Klopfer met fin aux allégations de dérives financières que l’on a véhiculées contre moi et mon équipe. Bien au contraire, l’audit financier souligne très précisément que sans les décisions courageuses que j’ai prises, notre commune aurait frôlé une mise sous tutelle par la Préfecture ! »

Lorsque Laurence SPICHER-BERNIER écrit ces lignes, en septembre 2010, elle est maire depuis septembre 2008, soit depuis deux années. Soit elle s’accuse elle-même, soit elle accuse son prédécesseur Jean MARSAUDON (UMP) d’avoir entraîné la commune dans des « dérives financières ». Il faut rappeler que Laurence SPICHER-BERNIER a été adjointe au maire chargée de l’Économie de 2001 à 2008. Elle est donc en 2e ligne pour assumer la responsabilité des «dérives financières» dont elle se décharge sur de mystérieux propagateurs d’allégations…

Il s’agit manifestement d’un contenu politique à l’égard duquel les droits d’expression politique des minorités doivent pouvoir s’exprimer conformément à la loi. Et le maire refuse le droit d’expression aux conseillers municipaux dans cette lettre. Ceux-ci saisissent le Tribunal administratif de Versailles.

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Le journal politique de Laurence Spicher-Bernier
,
maire (UDI) de Savigny-sur-Orge,
payé par le budget de la commune (septembre-octobre 2010)

Question. Quel est le jugement du Tribunal administratif ?
Bernard MÉRIGOT.
Il est très net. « Dans les villes de 3500 habitants et plus, lorsque la commune diffuse sous quelque forme que ce soit, un bulletin d’information générale sur ses réalisations et la gestion du conseil municipal, un espace est réservé à l’expression des conseillers n’appartenant pas à la majorité municipale ». (2)

UNE RÉPONSE ENFANTINE

Question. Que répond Laurence SPICHER-BERNIER ?
Bernard MÉRIGOT. On peut lire « Nous ferons en principe appel » (3). Pour Laurence SPICHER-BERNIER, cet appel est justifié par le fait que le refus de donner la parole aux conseillers municipaux minoritaires est conforme à « ce qui est pratiqué depuis longtemps dans les villes de gauche voisine ». On se croirait dans une cour d’école : « Y en a qui font pareil que moi, et y sont pas punis ». Cet argument est enfantin.

UN RAISONNEMENT TORDU

On est à Savigny-sur-Orge. On n’est pas ailleurs, dans une autre commune. Qui peut croire un seul instant que toutes les pratiques sont forcément mauvaises dans les autres communes en particulier, celles «de gauche» ? Et les communes «de droite», elles sont peut-être toutes exemplaires en matière de démocratie ?

Un tel raisonnement est tordu parce qu’il est fondé sur un énoncé implicite : « Il y a des communes qui méprisent les oppositions, donc il faut faire pareil ». Voila qui est particulièrement stupide. Il s’agit là d’une forme particulière de syllogisme à deux termes qui appartient à la catégorie des preuves communes. ARISTOTE lui donne le nom d’enthymème (4).

L’intelligence républicaine impose la seule réponse qui vaille. Inspirons-nous des bonnes pratiques démocratiques des autres communes ! Et ne reproduisons pas les mauvaises pratiques !

L’IMAGE DÉTÉRIORÉE
DE LA VIE DÉMOCRATIQUE DANS LA COMMUNE

Question. Quelles sont les conséquences pour la commune ?
Bernard MÉRIGOT.
Tous ces contentieux dans lesquelles le maire et la municipalité sont condamnés ont un effet détestable sur l’image de la commune.

  • en refusant d’accorder un droit d’expression démocratique aux oppositions : mépris de la loi, mauvaise gouvernance.
  • en étant condamné par le Tribunal : mauvaise image de la commune.
  • en attaquant « ce qui est pratiqué depuis longtemps dans les villes de gauche voisines » : polémique partisane.
  • en annonçant que la commune fait appel : acharnement judiciaire (payé aux frais des contribuables) !

Question. Quelle est votre conclusion ?
Bernard MÉRIGOT. On doit se demander de quoi un pouvoir en place a peur lorsqu’il refuse des droits démocratiques ? Comme l’écrivait le philosophe John DEWEY : « Le remède aux maladies de la démocratie est : davantage de démocratie»
Il faut dénoncer sans relâche la démocratie manichéenne, celle qui consiste à opposer constamment ceux qui sont d’accord et ceux qui ne sont pas d’accord. La démocratie consiste à rechercher constamment des consensus, et non pas à fabriquer – et à exacerber – les dissensus.
Un (une) maire – et une municipalité – qui accordent le droit d’expression à ceux qui, à priori, ne pensent pas comme lui (elle), prend une décision qui ne peut que l’honorer. A Savigny-sur-Orge, nous en sommes loin.

RÉFÉRENCES
1. COMMUNE DE SAVIGNY-SUR-ORGE,
« Savigny-sur-Orge. La Lettre du maire », septembre-octobre 2010, n°1, format A4, 4 p.
2. TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE VERSAILLES, 
Jugement en date du 10 octobre 2013, Madame Chadia SEMDANI c/Commune de Savigny-sur-Orge, Dossier n°1101980. Audience du 26 septembre 2013. Lecture du jugement en séance publique du 10 octobre 2013, 5 pages.
La requête, enregistrée le 15 mars 2011, enregistrée par le tribunal le 15 mars 2011, émanait de Mme. Chadia SEMDANI, Jean-Marc DEFRÉMONT, Gisèle NEDJAR en leur qualité de conseillers municipaux de la commune de Savigny-sur-Orge.

3.
« Savigny-sur-Orge. Elle refusait un espace d’expression à l’opposition dans une publication de la ville. La municipalité rappelée à l’ordre par le tribunal », Le Parisien Essonne-matin, 16 octobre 2013. Article de Cédric Saint-Denis.
4. ARISTOTE, Rhétorique, Tome II. Les Belles lettres. Voir le chapitre 24, «Des enthymèmes apparents», p.127. «L’enthymème est une espèce de syllogisme».

COMMENTAIRE du 19 octobre 2013
Et un article de plus sur votre site relatant une condamnation des pratiques de Mme Spicher-Bernier ! Je consulte régulièrement votre site, mais je vais finir par croire que je suis sur celui de la Gazette du Palais.
Le jour où nos élus remplaceront leur mépris des règles démocratiques par une intégrité exemplaire dans l’exécution de leur mandat, alors on peut penser que l’abstention ne sera plus le premier parti politique de France.

COMMENTAIRE du 21 octobre 2013
Comme indiqué dans l’article du Parisien du 16 octobre 2013, « La commune a pris acte de la décision. Nous ferons en principe appel ». Il doit être précisé qu’un éventuel recours en appel n’est pas suspensif.
Bernard MÉRIGOT

Mention du présent article http ://www.savigny-avenir.info
ISSN 2261-1819
Dépôt légal du numérique, BNF 2013

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