La poursuite d’études supérieures après le baccalauréat est devenue depuis quelques années en France un sujet d’inquiétude et d’angoisse pour les élèves de terminale et leur famille. En 2018, le problème concerne plus de 800 000 élèves de terminale. En comptant leurs parents, cela représente plus de 2 millions de personnes qui sont confrontées aux arbitraires et aux secrets de Parcoursup qui décide les affectations, c’est-à-dire, l’acceptation ou le refus d’inscription dans un établissement donné. Une situation que beaucoup jugent scandaleuse.
DES ALGORITHMES SECRETS
Parcoursup est un site Internet du ministère de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Il est destiné aux élèves des classes terminales des lycées souhaitant poursuivre après le baccalauréat des études dans l’enseignement supérieur. Il constitue la procédure obligatoire d’inscription mise en place en 2018 en remplacement système dénommé Admission Post Bac (APB) utilisé précédemment. Il a concerné plus de 800 000 élèves qui y ont déposé leurs « voeux ». Il n’est pas anodin que le mot employé appartienne au registre du langage magique. Le propre des voeux est d’être satisfaits dans les contes fantastiques !
En ce printemps 2018, exactement 887 681 élèves se sont inscrits et sont dans l’attente d’une acceptation.
« ParcourSup » est nouvelle procédure d’inscription des élèves des classes terminales des lycées, au lendemain de leur obtention du baccalauréat. Elle est mise en place pour la première fois en ce printemps 2018. C’est un mécanisme complexe dont l’algorithme était jalousement jusqu’à présent gardé secret. Tout naturellement il a suscité – et continue de susciter – les légitimes inquiétudes des élèves, des parents et des enseignants.
Le ministère de l’Éducation nationale, contraint et forcé, a publié le 22 mai 2018 – en urgence – une partie de l’algorithme qui effectue le choix des élèves et décide leur affectation. Il était temps. Mais cela ne règle rien.
« Le code informatique de la plate-forme d’admission Parcoursup a été rendu public, lundi 21 mai 2018, mais les algorithmes locaux élaborés par les universités restent, eux, secrets. » (2)
Nous sommes passés :
- de 100% secret,
- à 50% public + 50 % secret.
C’est insuffisant. La démocratie, et les règles existantes en matière de libre accès aux documents publics, exige que les 50% qui demeurent secrets soient rendus publics. le plus rapidement L’argument selon lequel les universités appartiendraient à un autre monde, et que donc elles ne dépendraient pas du ministère de l’Éducation nationale, constitue une violence d’État faite aux citoyens (VEFAC).
DOCUMENT
LE MINISTÈRE DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR
DÉVOILE L’ALGORITHME PRINCIPAL DE PARCOURSUP
Le fait de la rendre public les algorithmes utilisés par les services publics a pour but de permettre à tous de vérifier que le fonctionnement du dispositif est conforme au droit. Le code informatique de la plate-forme Parcoursup destiné aux élèves des classes terminale pour leurs études après le baccalauréat sa été rendu public, lundi 21 mai 2018. Mais les algorithmes locaux élaborés par les universités restent eux, secrets.
La ministre de l’Enseignement supérieur Frédérique Vidal, et le secrétaire d’Etat au numérique Mounir Mahjoubi, ont rendu public, en « open source », l’algorithme national régissant les règles de Parcoursup, comme le veut la loi, le lundi 21 mai, à la veille des résultats de la première phase d’admission des candidats à l’entrée dans l’enseignement supérieur.
Une publication à titre indicatif, qui ne permettra pas aux candidats de connaître les techniques précises retenues par chaque université en vue d’opérer un tri des dossiers. En vertu du « secret des délibérations », le gouvernement a, en effet, insisté, lors du vote de la loi relative à la protection des données personnelles, lundi 14 mai, pour que les universités n’aient pas à dévoiler les algorithmes locaux mis au point pour assurer la cohérence entre le profil du candidat et les attendus de la formation demandée.
Des règles de transparence satisfaites ?
Les règles de transparence exigées par la loi étant « réputées satisfaites » d’emblée, les universités ont donc la liberté de limiter aux seuls candidats qui le demandent l’accès aux critères, aux modalités d’examen et aux motifs pédagogiques qui justifient leur admission ou leur refus d’admission. « Chaque formation est responsable de ses choix », avait justifié le ministère de l’enseignement supérieur, mercredi 16 mai, arguant que les candidats pourraient toujours, a posteriori, demander des explications. Parcoursup : le « secret des délibérations » sera maintenu
Dans un communiqué commun, lundi 21 mai 2018, Frédérique Vidal et Mounir Mahjoubi soulignent « la volonté du gouvernement de donner la plus grande transparence à la nouvelle procédure d’accès à l’enseignement supérieur », la publication de l’algorithme général de Parcoursup intervenant « à l’initiative de la ministre et avec plus de trois mois d’avance sur la date limite fixée par la loi du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants » (ORE).
La publication du code « permettra à chacun de vérifier que le fonctionnement de la plate-forme est conforme au droit », ajoute le communiqué. Cela favorisera également « la pleine compréhension des mécanismes de la nouvelle procédure d’entrée dans l’enseignement supérieur : non-hiérarchisation des vœux, absence de contraintes ; délais de réponse qui permettent, lorsque chaque candidat fait son choix, de libérer des places qui seront immédiatement proposées à d’autres candidats », veut-on croire au gouvernement.
Une exception à la loi…
Il reste que Parcoursup fait exception à la loi pour une République numérique, votée en octobre 2016, qui impose deux obligations aux administrations – et donc aux universités – recourant à des algorithmes dans le dessein d’aboutir à des décisions individuelles : intégrer systématiquement une « mention explicite » pour informer tous les usagers de l’existence et des modalités d’exercice de leur droit à connaître le détail des « règles » et « principales caractéristiques de mise en œuvre » du programme informatique utilisé ; et mettre en ligne et en libre accès – à compter du 7 octobre 2018 – les règles définissant « les principaux traitements algorithmiques utilisés dans l’accomplissement de leurs missions ». Des obligations que les universités ne seront pas tenues de remplir, en vertu de la loi ORE et de la loi sur la protection des données personnelles.
Le « secret des délibérations » pourrait, cependant, être contesté au regard du règlement général sur la protection des données personnelles (RGPD), qui entre en application le 25 mai. D’application directe, ce texte s’imposera à tous les Etats européens et pourra être invoqué par les étudiants en cas de litige. Ainsi, « dès qu’un étudiant aura un problème et fera appel à la Commission nationale de l’informatique et des libertés [CNIL], celle-ci rappellera que c’est le RGPD qui s’applique à l’échelle européenne et que la loi française doit s’y conformer », expliquait, le 15 mai, au Monde la sénatrice Sophie Joissains, opposée au « secret des délibérations ».
Parcoursup : le Sénat exige des décisions d’orientation plus transparentes
Dans une délibération du 22 mars, la CNIL rappelle d’ailleurs que l’exception aux règles de transparence accordée à Parcoursup est, en réalité, sans effet, car la loi Informatique et libertés et le RGPD lui-même comprennent des règles similaires auxquelles il n’est pas prévu de déroger.
RÉFÉRENCES
LE NÉVÉ Soazig, « Le ministère de l’enseignement supérieur dévoile l’algorithme principal de Parcoursup », Le Monde, 21 mai 2018. http://mobile.lemonde.fr/campus/article/2018/05/21/le-ministere-de-l-enseignement-superieur-devoile-l-algorithme-principal-de-parcoursup_5302387_4401467.html?xtref=
LÉGENDES DES ILLUSTRATIONS
- Le sourire des lycéens et des lycéennes avant d’avoir subi les décisions arbitraires et secrètes de Parcoursup.Page d’accueil en ligne sur le site du ministère de l’éducation. 23 mai 2018. https://www.parcoursup.fr/
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